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Les Nantaises au travail

Les séries anciennes révèlent la diversité des métiers exercés par les femmes durant l’Ancien Régime. Parmi les nombreux documents des corporations, maîtrises et jurandes conservés aux Archives de Nantes, voici une sélection de documents qui témoignent de la vie professionnelle des Nantaises, depuis les années de formation à la défense de leurs intérêts.

Les femmes intègrent généralement le monde du travail par l’apprentissage. Dans les actes de fermes des privilèges et brevets d'apprentissages de la corporation des maîtres-perruquiers, barbiers, baigneurs et étuvistes des années 1778 à 1784 (HH100), de nombreuses jeunes filles sont ainsi déclarées comme apprenties au domicile de coiffeuses.

Extrait des actes de fermes des privilèges et brevets d'apprentissages de la corporation des maîtres-perruquiers, barbiers, baigneurs et étuvistes des années 1778 à 1784 (HH100, page 20)

Extrait des actes de fermes des privilèges et brevets d'apprentissages de la corporation des maîtres-perruquiers, barbiers, baigneurs et étuvistes des années 1778 à 1784 (HH100, page 20)

Les maîtrises et jurandes enregistrent les personnes exerçant leurs professions. C’est le cas de « Catherine Perreau, marchande, veuve de Philippe Legrand, demeurant au Marchix » en 1750, ou encore d’Anne-Thérèse Blais, de Renée Guespin et de Louise Garrot reçues comme maîtresses-tailleuses en 1782.

Certaines femmes occupent des fonctions importantes. C’est le cas de la veuve Daviès, l’une des rares cheffes d’entreprise à Nantes au 18e siècle. Propriétaire d’une manufacture d’indiennes à Richebourg depuis 1771, elle s’agrandit en 1779 en acquérant une autre indiennerie située sur l’île de Petite-Biesse. Elle est ainsi à la tête d’un grande société, employant jusqu’à plusieurs centaines d’ouvriers.

Les Archives de Nantes conservent une pétition des ouvriers des manufactures d’indiennes nantaises contre l’introduction des toiles peintes étrangères dans le royaume de France, datée de 1786. Parmi les signataires figurent les ouvriers de la manufacture de la veuve Daviès, signe de l’importance de celle-ci dans le milieu des indienneurs nantais.

Face aux strictes règles des corporations, les travailleuses s’organisent pour défendre leurs intérêts. Dans un courrier datable des années 1780, les brocanteuses de Nantes se plaignent ainsi collectivement de la sévérité des marchands fripiers, qui les empêchent de vendre : « depuis longtemps que nous gémissons sous les lois des maîtres fripiers, nous pauvres brocanteuses ». Elles demandent à pouvoir exercer leur métier un jour par semaine, le samedi, sans craindre que « ces messieurs » ne viennent les « empêcher de gagner la vie à nos pauvres familles ». Cette supplique se termine par les signatures des brocanteuses.

Au 19e siècle, les femmes, n’ayant toujours pas accès à une formation qualifiante, continuent d’exercer en majorité des métiers précaires, difficiles et peu rémunérés. Les archives modernes en témoignent.

La poissonnerie municipale, installée sur l’île Feydeau, emploie un grand nombre de femmes. Les compteuses de sardines sont nommées par le maire de Nantes. Les Archives conservent des brevets de nomination extraits des registres de la mairie, qui montrent que ces places sont convoitées. Suite au décès d’une compteuse, des femmes postulent à cet emploi, en joignant un courrier de recommandation attestant de leur bonne conduite, moralité et aptitude.

Le registre pour la délivrance des livrets d’ouvriers par la commune de Doulon (3Z117) témoigne d’une forte présence féminine parmi les employés de la manufacture des tabacs. Noms, âges, lieu de naissance, description physique sont précisés. Au 19e siècle, tout ouvrier doit posséder un livret gardant trace de ses employeurs successifs.

À la manufacture des tabacs, la main d'oeuvre est en grande majorité féminine, ainsi en 1900 sur 1214 ouvriers, 1123 sont des femmes. Étendage, capage, groupage, paquetage…Encadrées par des surveillants et des chefs d’atelier, les cigarières sont présentes à différents postes de travail requérant habilité, minutie et savoir-faire. Leur salaire, réduit de moitié par rapport à celui des hommes, en font une main d’œuvre bon marché pour l’État. Ce dernier cherche d’ailleurs à améliorer leur accès à l’emploi. Une crèche et une école, ouvertes au sein même de la manufacture, accueille ainsi les enfants des ouvrières.

La garde de leurs enfants constitue parfois un frein au travail des femmes. Certaines doivent les placer auprès d’une nourrice. Cette profession est très réglementée, tel qu’en témoigne le carnet de nourrice au biberon décerné en 1906 à Victorine Greffier par le service de la protection des enfants du premier âge de la mairie de Nantes.