La crue du Gué-Robert à Doulon
La commune de Doulon est durement touchée. De par sa situation géographique, le ruisseau du Gué-Robert menace directement, à chaque montée des eaux, les boulevards de Doulon et de Sébastopol. Le pont de la Moutonnerie est un véritable baromètre des crues.
Dans ce quartier, la situation s’aggrave jusqu’au 21 février. Les tramways ne peuvent plus circuler ; le boulevard de Doulon est complètement immergé, débordant par le fait même sur les rues voisines. La commune de Doulon doit mettre en place des « bateliers pour assurer le passage et le ravitaillement des habitants du boulevard de la Liberté, la prairie des Mauves, le quartier de la Collinière, les rues Voltaire et Victor-Hugo », ainsi que des appontements. Il faudra attendre le 23 février pour constater une amélioration et mesurer un commencement de décrue.
Une fois l’eau partie, l’heure est à l’évaluation des dommages. Le Conseil municipal de Doulon estime à 33 661 francs les pertes subies par la population et les dépenses à la charge de la commune. C’est aussi le temps de la reconnaissance : en récompense du « zèle et dévoué concours » des agents municipaux et des cantonniers, le maire demande qu’une gratification leur soit accordée.
Dans les jours suivants la crue, la Ville de Doulon s’occupe de la remise en état des rues sinistrées : « désinfection et nettoyage des voies publiques inondées, désinfection des logements occupés par les indigents ».
Mais la situation du Gué-Robert réclame davantage que des mesures d’urgence. Exaspérés par les crues répétées, les habitants constituent un Syndicat de défense contre les inondations du Gué-Robert en mars 1904. Ils réclament l’assainissement du quartier auprès du maire de Doulon et du préfet de Loire-Inférieure.
Suite aux inondations de 1883, une étude avait déjà été réalisée pour expulser les eaux du bassin du Gué-Robert dans la Loire. Même si la Ville s’était réservée le droit d’acheter un terrain pour installer une pompe, le projet était resté sans suite.
Il est repris dans un projet de travaux présenté par les ingénieurs des Ponts et Chaussées en août 1904. Plaidant sa cause, le Syndicat souligne l’intérêt de la municipalité à ce qu’il soit exécuté dans les plus brefs délais, dans un courrier du 12 août 1904 : « Que d’argent employé à l’établissement des appontements, et, plus tard, à la réparation des immeubles dégradés ! Que d’argent perdu par l’interruption du commerce, par les locations réduites de prix ou même complètement abandonnées ! Que de misères et de gênes de toutes sortes pour les inondés ! ».
Deux pompes centrifuges, actionnées par un moteur à air comprimé et capables de débiter 1000 m3 par heure, sont finalement installées près du pont de la Moutonnerie, afin de refouler les eaux dans la Loire. Mises en place en 1905, ces pompes se révèleront efficaces dès 1906. Pourtant, lors des inondations de 1910, elles montreront leur limite. Fonctionnant quotidiennement jusqu’à 22 heures, elles ne pourront pas empêcher le débordement de l’eau dans les rues avoisinantes. Trois nouvelles pompes élévatoires seront alors programmées.
La revue de presse suivante montre l’étendue des dégâts et l’avancée inexorable de l’eau dans ce quartier bas de Doulon. Elle montre également la solidarité qui s’installe entre les sinistrés.