Document du mois – La Trésorerie générale et la reconstruction de la place Bretagne dans l’après-guerre
Après les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, la place Bretagne est entièrement réaménagée. Sortent alors de terre plusieurs édifices monumentaux, qui sont depuis devenus de véritables marqueurs dans le paysage nantais : l’hôtel des Postes, l’immeuble de la Sécurité sociale, la tour Bretagne. Jusqu’à la fin des années 1990, un quatrième bâtiment venait compléter cette cité administrative : la Trésorerie générale de Loire-Atlantique, qui se trouvait à la place qu’occupe aujourd’hui Intersport.
La place Bretagne, futur centre administratif de la ville reconstruite
En septembre 1943, les bombes alliées s’abattent sur Nantes, causant des milliers de victimes et de nombreux dégâts dans la ville. Au numéro 7 de la rue de Bréa, le bâtiment de la Trésorerie générale de Loire-Inférieure est gravement endommagé. L’immeuble étant inutilisable, les services financiers sont contraints de trouver d’autres locaux pour les accueillir : ils se replient d’abord dans l’école Saint-Félix, puis, faute de mieux, s’installent provisoirement au sein du musée Dobrée. Le ministère des Finances décide alors de construire un nouvel édifice, qui serait spécifiquement conçu pour répondre aux besoins de la Trésorerie.
C’est la place Bretagne qui est choisie pour l’accueillir. Située au sein du quartier du Marchix, elle a également été très détruite par les bombardements. Son réaménagement, déjà envisagé dans les années 1930, est intégré au plan de reconstruction de Nantes. Elle est destinée à devenir le coeur administratif de la ville, réunissant notamment l’hôtel des Postes et l’immeuble de la Sécurité sociale. En cette période d’après-guerre, Nantes ambitionne en effet de se positionner comme un grand centre tertiaire.
Ainsi, du point de vue de la Municipalité, la place Bretagne présente de nombreux atouts pour y installer la Trésorerie générale : « Nous estimons que le quartier du Marchix, très central, situé à proximité de la Banque de France et des principaux établissements de crédit, d’une part, de la Mairie et de la Préfecture, d’autre part, et dans lequel doit s’élever prochainement le futur hôtel des Postes est bien l’emplacement idéal au siège de l’Administration des Finances de notre département » (délibération du Conseil municipal du 29 mai 1951).
La Trésorerie générale, place Bretagne, en août 1961 (25Fi3313)
Une architecture dans le respect du plan de Michel Roux-Spitz
La volonté de bâtir ce nouvel édifice administratif sur la place Bretagne est formulé dès 1944. Il faut néanmoins attendre plusieurs années avant que le chantier commence, malgré les demandes pressantes du Trésorier-payeur général. Après plusieurs propositions de parcelles, le choix se porte finalement sur un terrain de 1 368 m², situé au sud-ouest de la place, à l'angle de la rue Mercoeur (1051W81 et 40W167). Cette parcelle faisant partie du domaine public communal, la Ville accepte de la déclasser et de la céder gratuitement à l’État en 1951.
La Trésorerie générale étant une administration de l'État, la construction du bâtiment est à la charge du ministère des Finances. L’architecte en chef du Trésor, Charles Clément-Grandcourt, présente de premiers plans à la fin des années 1940. Mais c’est finalement André Chatelin (1915-2007) qui est désigné pour édifier la « cité financière de Nantes » en 1950. Grand Prix de Rome en 1943, ce dernier est un habitué des commandes ministérielles.
Une contrainte majeure s’impose à l’architecte : le respect du projet d’ensemble de la place Bretagne, établi par Michel Roux-Spitz, architecte en chef chargé de la reconstruction de Nantes (1051W81). André Chatelin conçoit donc un immeuble aux formes simples et régulières, aux importantes ouvertures. Au rez-de-chaussée, un grand hall vitré est destiné à l’accueil du public (1051W81) Deux étages de bureaux se superposent au-dessus. Leur façade en pierre, percée de multiples fenêtres, rappelle fortement celle conçue par Michel Roux-Spitz pour l’hôtel des Postes en face. On y retrouve d’ailleurs, comme à la Poste, ces pavés de verre qui indiquent la présence d’un escalier à l’intérieur (ici visibles à gauche de la photographie).
Les travaux débutent en 1953 : ce bâtiment constitue ainsi le premier coup de pioche donné pour la transformation de la place Bretagne. Alors que la Trésorerie générale est inaugurée en 1960, il faut attendre les années 1960 et 1970 pour que les autres constructions de la place soient achevées.
Les évolutions récentes : de centre des finances à magasin d’articles de sport
En janvier 1997, la Trésorerie générale quitte la place Bretagne pour le quai de Versailles. Son ancien bâtiment est réaménagé par Tetrarc, agence d’architecture nantaise fondé par Michel Bertreux et Patrick Moreuil.
L’édifice conçu par André Chatelin ne peut être conservé et est démoli. Les architectes de Tetrarc en reprennent toutefois le principe : le verre au rez-de-chaussée, la pierre aux étages. Livré en 2001, leur « Urban Mac » superpose un magasin de sport au rez-de-chaussée, (Go Sport, aujourd’hui Intersport), des bureaux à l’étage (réinvestis par certains services de la Trésorerie) et, sur le toit, des logements avec un jardin. Cet empilement est clairement lisible sur la façade, par trois approches esthétiques différentes. Il est pensé comme « une nouvelle façon d’habiter en ville » par le cabinet Tetrarc.
Pour en savoir plus
Les Archives de Nantes conservent de nombreuses photographies du chantier de la place Bretagne. Vous pouvez les consulter sur le catalogue en ligne.
L'histoire de la place Bretagne vous intéresse ? Rendez-vous sur Nantes Patrimonia pour en apprendre plus sur la Tour Bretagne et sur l'Hôtel des Postes.